Reporting de durabilité CSRD : l’impact des nouvelles obligations

Temps de lecture: 15 min.

La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) est une directive européenne, adoptée en novembre 2022, qui vise à harmoniser le reporting de durabilité des entreprises. Elle introduit notamment le concept de "double matérialité" et renforce les normes ESG (Environnementales, Sociales et de Gouvernance).

L'instauration de cette réglementation représente une avancée majeure pour la transparence financière et la prise en compte de l'impact environnemental des entreprises. Quelles sont les entreprises concernées et comment doivent-elles s'y préparer ? Découvrez ce qu'implique cette nouvelle réforme dans cet article.

Définition de la directive CSRD (C'est quoi la CSRD ?)

La directive CSRD établit un cadre légal pour la divulgation d'informations relatives à la RSE, exigeant des entreprises qu'elles fournissent des données détaillées sur la manière dont leurs activités affectent la société et l'environnement.

Elle s'appuie sur les principes de transparence et de responsabilité pour améliorer la qualité et la comparabilité des informations publiées.

Historique et adoption de la CSRD

Adoptée pour succéder à la Non Financial Reporting Directive (NFRD) datant d’août 2017, la CSRD est le résultat d'un consensus européen croissant sur la nécessité d'une approche unifiée et détaillée du reporting en matière de durabilité.

La commission européenne a lancé et validé le texte final de la CSRD fin décembre 2022. La nouvelle directive s’appliquera à partir de 2024.

Objectifs et application de la CSRD

L'objectif principal de la directive sur le reporting de durabilité des entreprises (CSRD) est d'instaurer une transparence accrue dans la communication des performances ESG qui sont :

  • Environnementales ;
  • Sociales ;
  • de Gouvernance.

Cette uniformisation a pour but de permettre aux investisseurs, aux clients et à toutes les parties prenantes concernées de disposer d'informations fiables pour prendre des décisions éclairées.

Jusqu'à l'adoption de la CSRD, il n'existait pas de cadre harmonisé à l'échelle de l'Union européenne, ce qui rendait difficile la comparaison des performances ESG entre différentes entreprises et secteurs.

La CSRD vise donc à pallier ce manque en établissant des normes de reporting détaillées et en exigeant des entreprises qu'elles fournissent des informations sur la façon dont elles gèrent les impacts sociaux et environnementaux de leurs activités, ainsi que la manière dont elles intègrent les principes de gouvernance.

La directive est loin d'être un simple exercice de conformité ; elle s'avère être un outil stratégique de gestion, éclairant la performance de l’entreprise au-delà des aspects financiers. Elle est envisagée comme un levier pour la transition écologique et pour l'accès au financement durable.

Dans cette perspective, la CSRD prévoit une convergence avec des normes internationales telles que celles de l'International Sustainability Standards Board (ISSB) et de la Global Reporting Initiative (GRI), allégeant ainsi la charge de reporting pour les entités concernées et optimisant leur efficacité opérationnelle.

Qui est concerné par la directive CSRD ?

La directive CSRD concerne un large éventail d'entreprises à travers l'Europe. En premier lieu : toutes les sociétés cotées sur les marchés réglementés européens sont concernées, à l'exception des micro-entreprises. Cela inclut les PME cotées, qui bénéficient toutefois de normes allégées pour le reporting.

La directive s'applique à environ 50 000 entreprises, contre 11 700 auparavant avec la NFRD. Cela signifie que de nombreuses entreprises qui n'étaient pas auparavant soumises à des obligations de reporting extra-financier seront désormais concernées.

Il faut noter que pour les entreprises non européennes, l'échéance est fixée à 2029 pour l'exercice 2028. Enfin, une attention particulière devra être portée aux formes juridiques qui seront concernées, par exemple pour les SAS qui étaient exemptées de produire une DPEF dans le cadre de la directive NFRD.

Quand appliquer la CSRD ?

La planification de votre rapport extra-financier doit se faire en tenant compte des directives récentes et des obligations qui en découlent. Selon la structure et l'échelle de votre entreprise, voici un guide pour déterminer le moment opportun pour préparer et soumettre votre rapport, en se basant sur l'année précédant l'exercice concerné :

Catégorie d’entrepriseCritèresDate d’exerciceDate de reportingMesures transitoires
Grandes entreprises > 500 salariésBilan > 20M€ ou CA > 40M€20242025N/A
Autres entreprises répondant à 2 des 3 critères> 250 salariés ou
Bilan > 20M€ ou CA > 40M€
20252026N/A
PME cotées sur le marché réglementé européenEmployés > 10 ET Bilan >250 K€ ET CA > 700 K€2026 avec possibilité de reporter à 2028*2027 avec possibilité de reporter à 2029*N/A
Entreprises non européennesCA > 150M€ sur le marché UE les 2 dernières années + au moins 1 filiale UE qui remplit les critères de grande entreprise20282029Allègement pour les entreprises < 750 salariés et reports d’application de normes

*Jusqu'en 2028, les PME cotées en bourse bénéficient d'une période transitoire de deux ans durant laquelle elles peuvent choisir de ne pas se conformer aux obligations de reporting imposées par la CSRD. Pendant cette période, elles doivent néanmoins expliquer succinctement dans leur rapport de gestion les motifs de cette non-application.

Pour une compréhension approfondie des mesures transitoires concernant certaines entreprises et pour consulter le calendrier détaillé de l'application progressive de certaines normes, il est recommandé de se référer au tableau fourni par la commission européenne, spécifiquement dans la section 10 de la norme ESRS 1.

Quel a été le rôle de la commission européenne dans l’élaboration de la CSRD ?

La Commission Européenne, en élaborant la CSRD, a répondu à la demande croissante pour une transparence accrue des entreprises sur les questions ESG.

Elle a établi des normes solides, avec des mesures transitoires, pour guider les entreprises vers une intégration poussée de la durabilité dans leurs rapports financiers, participant ainsi au Green Deal européen (rendre l’Europe climatiquement neutre en 2050) et à la stratégie de finance durable de l'UE.

Comprendre l'Acte délégué de la CSRD

L'Acte délégué de la CSRD constitue une avancée majeure dans le cadre réglementaire européen. Approfondissons les différentes facettes de cet acte.

Le processus d'adoption de l'Acte délégué

L'adoption de l'Acte délégué est une étape qui s'inscrit dans le cadre législatif européen. Ce processus a impliqué l'examen des propositions de la commission européenne par les États membres et le Parlement Européen, suivi de consultations publiques.

Ces étapes ont abouti à l'Acte délégué, publié le 31 juillet 2023, qui reflète un consensus et répond aux enjeux RSE de manière équilibrée. Il fixe les 12 nouveaux standards européens de reporting et de durabilité des entreprises.

Implication de l'Acte délégué dans l'application de la CSRD

L'Acte délégué, une fois adopté, joue un rôle directeur dans l'application de la CSRD. Il détermine les standards de reporting spécifiques que les entreprises doivent suivre.

Cette implication assure une mise en œuvre harmonisée de la directive à travers l'Union Européenne, permettant ainsi de répondre aux besoins d’information de certains acteurs, eux-mêmes soumis à des obligations de reporting ESG, comme les acteurs financiers.

Lien entre l'Acte délégué et les normes ESRS

Les normes ESRS sont intrinsèquement liées à l'Acte délégué, celui-ci servant de cadre réglementaire pour leur application.

Les normes définissent de manière précise lesinformations que les entreprises doivent divulguer, assurant la transparence et la comparabilité nécessaires à l'analyse des performances ESG.

Les normes ESRS et leur importance dans la CSRD

Les normes ESRS s'avèrent être le socle du reporting de durabilité imposé par la CSRD. Examinons en détail l’impact de ces normes.

Définition et objectifs des normes ESRS

Les normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards) constituent un ensemble de directives, de critères, détaillant la manière dont les entreprises doivent rapporter les informations.

Établies par l’EFRAG (le groupe européen sur l’information financière), ces 12 normes couvrent 3 thématiques principales :

  • L’impact environnemental (pollution, climat, biodiversité, économie circulaire, préservation de l’eau) ;
  • l’impact social (consommateurs et employés) ;
  • l’impact de la gouvernance (conduite des affaires).

L'objectif est de standardiser le reporting ESG à travers l'Europe. Les normes ESRS exigent que les données rapportées soient susceptibles d'analyse, que ce soit sous une forme quantitative ouqualitative.

Ainsi, chaque norme se décompose en "Exigences de divulgation" (Disclosure Requirements - DR), qui précisent les données à collecter et à intégrer dans le rapport.

Prenons l'exemple de la norme liée au climat : elle inclut des DR tels que les stratégies de décarbonation, les initiatives d'adaptation au changement climatique, les plans de transition et les moyens financiers y afférant.

Bien que l'intégralité des normes ESRS soit encore en cours de finalisation, les entreprises peuvent se référer à la plateforme Impactdéveloppée par l’État français pour obtenir un avant-goût de ces standards et commencer à se préparer aux futures exigences. Cela permet de se positionner proactivement et de s'adapter en conséquence pour répondre aux attentes imminentes en matière de durabilité.

Lien entre les normes ESRS et le reporting de durabilité

Le lien entre les normes ESRS et le reporting de durabilité est fondamental. Les normes ESRS servent de référence pour structurer le contenu des rapports de durabilité.

Elles offrent un cadre qui guide les entreprises dans la collecte et la divulgation d'informations pertinentes et fiables. Ces normes sont essentielles pour que le reporting réponde aux exigences de la CSRD et aux attentes des parties prenantes.

Impact des normes ESRS sur les entreprises concernées par la CSRD

L'impact des normes ESRS sur les entreprises visées par la CSRD est significatif. Elles doivent désormais intégrer dans leur stratégie et leur gestion interne des mécanismes de suivi et d'analyse répondant aux critères des normes ESRS.

Cela peut impliquer :

  • Des changements dans les systèmes de reporting interne ;
  • la formation de leur personnel ;
  • la redéfinition des objectifs d'entreprise pour s'aligner sur les principes de durabilité.

Certaines normes ESRS seront universelles et applicables à toutes les entreprises. D’autres seront sectorielles (en fonction du secteur d’activité) et déterminées à partir de juin 2024, en même temps que des normes spécifiques aux PME.

Quels sont les indicateurs csrd ?

Rapport de durabilité selon la CSRD

La CSRD redéfinit les contours du rapport de durabilité. Penchons-nous sur les implications de cette directive pour le contenu et la préparation de ces rapports.

Contenu du rapport de durabilité

Le contenu du rapport de durabilité, conformément à la CSRD, doit inclure une analyse approfondie des impacts RSE. Cela englobe la divulgation d'informations sur la stratégie de durabilité, les risques et opportunités ESG, ainsi que les résultats et performances dans ces domaines.

Les entreprises sont également encouragées à communiquer sur leurs politiques, objectifs et engagements en matière de durabilité, y compris les indicateurs clés de performance.

Le rapport de durabilité devra être publié sous format électronique dans une section dédiée du rapport de gestion.

Rôle du rapport de durabilité dans le cadre de la CSRD

Le rapport de durabilité joue un rôle crucial dans la stratégie globale de la CSRD. Il sert de vitrine pour la transparence de l'entreprise et sa responsabilité vis-à-vis des enjeux ESG.

En fournissant des informations vérifiables et fiables, le rapport permet aux investisseurs et aux clients d'évaluer l'engagement et la performance de l'entreprise en matière de durabilité.

Comment préparer un rapport de durabilité conforme à la CSRD ?

Pour préparer un rapport de durabilité conforme à la CSRD, les entreprises doivent suivre plusieurs étapes. Elles doivent d'abord bien comprendre les exigences de la directive et les normes ESRS correspondantes.

Il est également essentiel d'impliquer toutes les parties de l'entreprise : de la direction aux opérationnels, dans la collecte et l'analyse des données ESG.

Les entreprises doivent aussi mettre en place des processus internes pour l'évaluation et la vérification des informations rapportées. Un organe de gouvernance doit assurer collectivement que le rapport de durabilité est conforme à la CSRD, aux normes ESRS et aux exigences de l'article 8 du règlement Taxonomie.

Enfin, la CSRD impose que le rapport de durabilité soit soumis à une vérification externe, par un commissaire aux comptes ou un auditeur indépendant. Initialement avec une assurance de niveau modérée, il se pourrait qu’à partir de 2028 cette assurance soit rehaussée à un niveau raisonnable.

La double matérialité dans le contexte de la CSRD

La double matérialité constitue un élément central de la CSRD. Elle met en relief la nécessité pour les entreprises d'évaluer l'incidence de leurs actions sur les questions de responsabilité sociale et environnementale (RSE), et réciproquement, l'effet de ces questions sur leur propre performance. Décortiquons ce principe essentiel.

Définition de la double matérialité

La double matérialité est une approche qui exige des entreprises qu'elles considèrent deux perspectives :

  • L'impact des enjeux de durabilité sur leur performance financière ;
  • l'impact de leurs activités sur la société et l'environnement.

Il s’agit donc de reconnaître que les performances financières et non financières sont interdépendantes.

Importance de la double matérialité dans le reporting de durabilité

Le concept de double matérialité est fondamental pour les rapports de durabilité. Il permet d'aligner les objectifs économiques avec les principes de durabilité.

En mettant en lumière les interactions entre les impacts externes et internes, la double matérialité enrichit la prise de décision stratégique et la communication avec les parties prenantes.

Comment prendre en compte la double matérialité dans le rapport de durabilité ?

Pour intégrer efficacement la double matérialité, les entreprises doivent procéder à une analyse transversale de leurs activités, en identifiant les zones de convergence entre les intérêts économiques et les impacts environnementaux et sociaux.

Elles doivent évaluer non seulement les risques et opportunités qui en découlent, mais aussi mesurer et communiquer sur l'efficacité des réponses apportées. Cette démarche stratégique doit être documentée de façon transparente, mettant en évidence les méthodes d'analyse et les indicateurs utilisés pour illustrer l'engagement de l'entreprise envers une croissance durable et responsable.

Le dialogue avec les parties prenantes est également essentiel pour affiner cette analyse et s'assurer que le rapport de durabilité reflète fidèlement les préoccupations matérielles. En suivant ces lignes directrices, les entreprises pourront non seulement répondre aux exigences de la CSRD, mais aussi valoriser leur engagement envers une gestion durable.

Le seuil d'application de la CSRD

La CSRD marque une avancée significative en exigeant des entreprises européennes qu'elles publient des informations approfondies sur les enjeux ESG.

À partir de 2024, elle s'appliquera aux entités déjà concernées par la NFRD, notamment les sociétés cotées avec plus de 500 salariés et un bilan ou un chiffre d'affaires conséquent.

Ensuite, en 2025, l'obligation s'étendra aux grandes entreprises répondant aux critères financiers ou de taille spécifiés. Les PME cotées, quant à elles, auront jusqu'à 2026 pour se conformer, bénéficiant de normes adaptées et d'un délai supplémentaire si nécessaire.

Les grandes entités hors Europe avec des activités notables dans l'UE devront se conformer à partir de 2028, assurant ainsi une couverture étendue et une transparence accrue pour presque 50 000 sociétés.

Le seuil d'application de la CSRD est donc conçu pour capturer un large spectre d'entreprises et s'assurer que les informations de durabilité soient disponibles pour les investisseurs ou toute autre entité concernée. Le but étant de favoriser une prise de décision informée en matière d'investissement durable.

La taxonomie SFDR et son lien avec la CSRD

La taxonomie déjà existante de la SFDR vient s’articuler avec la CSDR pour renforcer la transparence des pratiques durablesen matière de finance. Voyons comment :

Qu'est-ce que la SFDR ?

La SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) est une réglementation européenne qui vise à clarifier la présentation des informations liées à la finance durable.

Elle impose aux acteurs financiers de divulguer la manière dont ils intègrent les risques de durabilité dans leurs processus de décision d'investissement et les caractéristiques de durabilité de leurs produits financiers.

Elle a été mise en place pour lutter contre le greenwashing, accroître la transparence des activités financières et diriger les investissements vers des actifs plus respectueux de l’environnement. Cette réglementation s’applique à l’ensemble des intervenants sur les marchés financiers de l’Union Européenne.

Comment la SFDR influence-t-elle la CSRD ?

La SFDR complète la CSRD en imposant des exigences de divulgation similaires, mais spécifiquement adaptées au secteur financier.

Les informations publiées selon la SFDR peuvent fournir des données utiles pour le reporting de durabilité des entreprises selon la CSRD, en établissant un cadre pour évaluer l'impact des activités économiques sur les objectifs environnementaux.

Impact de la taxonomie SFDR sur le reporting de durabilité selon la CSRD

La taxonomie SFDR enrichit le reporting de durabilité en offrant des critères clairs pour déterminer si une activité économique peut être considérée comme durable.

En alignant les informations à divulguer avec ces critères, les entreprises pourront fournir des rapports de durabilité plus structurés et précis, facilitant ainsi l'évaluation de leurs pratiques et stratégies de durabilité.

La CSRD marque un tournant dans la réglementation européenne, avec une application progressive jusqu'en 2028 qui va étendre la transparence et renforcer la durabilité au cœur des entreprises.

En déployant des normes de reporting unifiées et en mettant l'accent sur les données ESG, cette directive vise non seulement à responsabiliser les entreprises sur leur impact environnemental et social, mais aussi à leur offrir les moyens de prouver leur engagement en faveur d'une gouvernance responsable.

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