Coûts de l'énergie : sortez couverts ! Comment mettre en place une stratégie de couverture de ses achats d’énergie d’entreprise ?

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L’année 2022 a vu les marchés de gros de l’énergie faire les gros titres avec des prix du gaz européen multipliés par près de 4 entre janvier et août 2022, entraînant à leur suite ceux de l’électricité, multipliés par 10 sur la même période.

D’après une étude menée par Agicap sur les mouvements bancaires des entreprises en 2022, les coûts des entreprises françaises liés à l’énergie ont augmenté de 51% entre 2021 et 2022. Cette moyenne, qui n’atteint pas le niveau des marchés, cache des situations très disparates entre les entreprises qui avaient couvert une part importante de leurs achats d'énergie et les autres. Panorama des solutions à mettre en oeuvre pour couvrir ses achats d'énergie en 2023.

Le coût de l’imprévision face à la crise de l’énergie**

Nous pouvons opposer deux cas :

  • Les entreprises protégées par un contrat à prix fixe encore en cours pendant l’année 2022 et celles qui avaient anticipé leurs achats d’énergie. Par exemple, un réseau de 300 boulangeries et points de restauration rapide, client d’Agicap et grand consommateur d’électricité, qui a négocié son contrat fin 2021 pour 3 ans, n’a subi aucune hausse de ses coûts de l’énergie en 2022.
  • Les entreprises qui achètent leur énergie au prix de marché sans couverture, ou bien dont le contrat à prix fixe arrivait à échéance en 2022. Par exemple, Ervor, PME industrielle francilienne de 50 salariés, dernier fabricant français de compresseurs d’air, dont le contrat à prix fixe de 3 ans arrivait à échéance le 31 décembre 2022. Son directeur général s’est vu proposer un nouveau tarif multiplié par 50 par son fournisseur de gaz et d’électricité, puis plus que par 15 après avoir médiatisé la proposition commerciale sur les réseaux sociaux. Il a fini par jouer la montre avant la date de fin de contrat.

Les premières n’ont pour ainsi dire pas vu passer la crise de l’énergie en 2022, car leurs prix de fourniture sont restés stables. Les secondes se sont retrouvées dans des situations intenables économiquement, avec un risque pour la pérennité de l’entreprise.

Les contrats à prix fixe se trouvent des deux côtés de la balance car ils offrent une protection totale pour les entreprises en cours de contrat et un aléa fort pour celles qui arrivent à échéance dans l’année.

Ces exemples illustrent bien le coût de l’imprévision, a fortiori dans un monde où les fluctuations des marchés sont aussi violentes qu’en 2022.

La couverture des achats d’énergie comme hygiène de survie ?

D’après une étude AgileBuyer, près de 70% des directions achats d’entreprises étaient couvertes à 50% et plus pour 2023 sur leurs achats d’énergie. De nombreuses entreprises de taille intermédiaire à grande utilisent en effet des mécanismes de couverture pour garantir le prix et la sécurité de leurs approvisionnements.

Une stratégie de couverture ou hedging vise soit à faire baisser les coûts d’achat de l’énergie soit à rendre ces coûts moins variables, ces deux objectifs n’étant pas toujours combinables.

Cette stratégie de couverture ou hedging peut donner lieu à la livraison d’une contrepartie réelle (l’énergie objet des achats) ou d’une contrepartie financière uniquement (dans le cas où ce sont des produits dérivés qui font l’objet d’achats).

Comment mettre en œuvre une stratégie d’achats dynamiques d’énergie ?

Dans le cas d’une contrepartie réelle, il est possible de mettre en œuvre une stratégie d’achats dynamiques pour acheter de manière opportuniste au meilleur prix ou limiter la variation de ses prix d’achat plutôt que de souscrire à une offre de marché à prix fixe ou indexée sur les marchés.

On parle de découpage ou d’achat clics, d’achats par blocs, mais également de contrat ou de découpage top. Ces achats dynamiques peuvent concerner tout ou partie des besoins de fourniture d’énergie d’une entreprise, sur une durée qui peut varier entre le mois et l’année et à un horizon qui peut aller du lendemain à plusieurs années en avance.

Plusieurs options existent :

  • Stop loss ou Take Profit : il s’agit d’un niveau de prix qui, lorsqu’il est atteint (dans le premier cas à la hausse, dans le second à la baisse), déclenche l’achat de tout ou partie du volume de consommation prévisionnel. Le plus dur reste de déterminer ce niveau de stop loss souhaité, car cela suppose d’estimer la perte financière maximale pour chaque niveau de stop loss ou take profit donné. Ces stratégies sont particulièrement adaptées aux entreprises dont les structures de coûts sont fortement impactées par les coûts de l’énergie.
  • Hedge ratio ou ratio de couverture : il consiste à fixer des volumes minimaux et maximaux à acheter sur une certaine période. Ces stratégies permettent de lisser les coûts de l’énergie et de conserver un budget stable.
  • Value at risk : cette surcouche basée sur une distribution de probabilités par niveau de prix permet de créer des contraintes dynamiques pour les deux méthodes précédentes, qui prennent en compte la volatilité du marché.

Comment se couvrir de la hausse des coûts de l’énergie sur les marchés financiers ?

Il est également possible de couvrir son risque prix avec différents types d’instruments financiers. Auquel cas, il n’y a pas de livraison de commodité à l’échéance, mais uniquement un flux financier :

  • Contrats à terme : pour se couvrir contre une éventuelle hausse des prix sans chercher à profiter d’une baisse, il est possible d’acheter des forward ou des futures. Il s’agit de contrats à paiement et livraison différés par lesquels l'acheteur et le vendeur s'engagent à acheter et à vendre la commodité à un prix fixé lors du contrat (strike). Sur les marchés organisés, on parle de « futures » qui sont donc standardisés (dénomination, qualité, quantité, date et lieu de livraison); s'ils sont conclus en gré à gré, ce sont des « forwards ».
  • Options : pour se couvrir contre une éventuelle hausse des prix, tout en se laissant l’option de bénéficier d’une baisse de prix, il est possible de souscrire des options. Elles donnent le droit (et non l’obligation) à l’acheteur d’acheter un contrat à terme à un prix donné jusqu’à une date donnée appelée maturité contre paiement d’une prime (prix de l’option).
  • Swaps : Le swap, négocié surtout en gré à gré, permet de fixer un prix d'achat ou de vente pour des périodes allant de dix-huit mois à cinq ans, voire huit ou dix ans. L'un des cocontractants s'engage à verser pendant une certaine période et à intervalles réguliers un prix variable et à recevoir un prix fixe.

Ces stratégies de couverture nécessitent généralement de faire appel à un professionnel du courtage en énergie.

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